Depuis quelques années, les environnements professionnels évoluent très vite, contraignant les collaborateurs à s’adapter à des changements fréquents, parfois éphémères. La crise du Covid-19, suivie par la généralisation du télétravail – à la fois vecteur de progrès, mais aussi source de difficultés et de stress – a modifié les repères du travail. Aujourd’hui encore, de nombreuses entreprises vivent au rythme des crises internationales, tout en répondant à des impératifs de rentabilité. Dans ce contexte, comment se protéger du stress, et comment en faire un allié au quotidien plutôt qu’un ennemi ? Éléments de réponse de Sandrine Bertrand, formatrice en communication, management et développement personnel.
À l’origine, le stress est une réaction naturelle de l’organisme face à une situation perçue par le cerveau comme dangereuse, et dont l’enjeu peut être vital. Il représente alors une énergie positive. Mais dans le contexte actuel, le stress prend souvent une tout autre dimension : il est de plus en plus perçu comme négatif, pesant, voire paralysant.
Ces dernières années ont en effet été particulièrement éprouvantes pour de nombreux collaborateurs, entraînant des changements profonds, des remises en question et, parfois même, des réorientations professionnelles complètes. Certains ont choisi de changer de métier, d’environnement ou de région. La quête de sens au travail est devenue une priorité pour beaucoup, et cela constitue en soi une avancée précieuse pour l’individu. Cependant, dans un contexte professionnel et social tendu, il n’est pas toujours évident de prendre du recul, de faire les bons choix ou de garder une vision claire de ce que l’on veut vraiment.
Le stress au travail : un enjeu de santé mentale
Pour les salariés, reconnaître et comprendre leur propre stress est un premier pas vers un mieux-être au travail. Or, en 2025, selon les dernières études, entre 25 % et 30 % des salariés français se déclarent en mauvaise santé mentale (baromètre Qualisocial 2025, enquête Ifop 2025 sur la santé mentale au travail). Les femmes semblent particulièrement touchées : 38 % d’entre elles présentent des signes de dépression contre 22 % chez les hommes et 12 % sont en grande détresse psychologique contre 6 % chez leurs collègues masculins.
Identifier les sources de stress professionnel et accompagner les collaborateurs dans leur gestion du stress est donc une démarche stratégique et, dans de nombreux cas, indispensable.
Les bénéfices ? Plus de bien-être, davantage d’engagement, plus de créativité… et, au final, plus de performance pour l’entreprise.
De nombreuses méthodes ont déjà fait leurs preuves pour réduire le stress. Aujourd’hui, de nouveaux outils, ou plus précisément l’usage plus généralisé d’applications mobiles, renouvellent le panel des techniques de gestion du stress.
Les manifestations du stress
Le stress en tant que tel n’est pas forcément visible. Ce qui est visible ou observable, ce sont ses conséquences plus ou moins directes sur la santé du salarié, ainsi que sur son travail. Par exemple : perte de mémoire, hypertension, insomnies, irritabilité, fatigue… Ainsi, au niveau professionnel, le stress peut être à l’origine de difficultés pour se concentrer, d’un isolement exagéré ou encore d’un burn-out. Les manifestations du stress sont très variées. Au quotidien, des comportements qui deviennent excessifs peuvent être les premiers signes d’un stress.
Par exemple :
- des excès : alcool, tabac, sorties, heure de coucher trop tardive, achats compulsifs…
- une tendance à la procrastination
- l’apparition de phobies
- une tendance à employer un vocabulaire négatif
- des difficultés relationnelles et des sautes d’humeur…
Mais pour quelle raison le stress engendre-t-il désagréments et problème de santé ? Face au stress, le corps réagit en fonction du rapport « qu’est-ce que ça me coûte pour ce que ça me rapporte ? ». Et quand l’effort devient trop important pour lui (peur de ne pas y arriver, se sentir incapable), il commence à mettre certaines choses en veille, comme la prise de recul, la lucidité ou la capacité à relativiser.
Les sources de stress
Les sources de stress découlent principalement de quatre grands types de situations : la perte de contrôle, l’imprévu, la nouveauté et l’ego menacé.
Le manque de confiance en soi
D’une manière générale, tout ce qui oblige à sortir de sa zone de confort peut générer du stress. Certains types de personnalités s’adaptent plus facilement aux nouvelles situations. Dans ce domaine, la confiance en soi est un précieux atout.
Les changements dans le cadre de travail
Le télétravail, mis en place dans l’urgence et sous la contrainte en 2020, a constitué un changement d’ampleur dans la vie et l’organisation personnelle et professionnelle des collaborateurs. Il s’est ensuite imposé sur le long terme.
Puis, il y a eu un retour progressif sur le lieu de travail, en mode hybride ou non. Ce retour s’est accompagné de nouveaux modes d’organisation, comme le flex office.
Beaucoup d’entreprises ont réduit leur nombre de bureaux individuels, proposant à la place des espaces partagés, impersonnels, que les collaborateurs doivent s’approprier au jour le jour. Un gain économique certain pour les entreprises… mais à quel prix pour les salariés ?
Ces nouvelles modalités de travail peuvent créer des tensions : conflits autour des quelques espaces disponibles, sentiment de déshumanisation, perte de repères… Cette nouvelle façon de travailler est génératrice de peurs, et donc de stress : difficultés d’organisation pour certains quand l’emploi du temps devient trop flexible, alternance parfois imprévisible entre télétravail et présentiel, difficultés relationnelles en présentiel…
Témoignage
« Ce matin-là, comme souvent, je suis arrivée un peu en avance pour m’installer à mon poste habituel en open space. Quelques minutes plus tard, un collègue est venu me voir, visiblement agacé. Il m’a dit sèchement que cette place était « réservée » pour son binôme et il m’a demandé de partir. Je n’ai pas compris, aucun emplacement n’est officiellement attribué, on est censés être en flex office. J’ai obéi, un peu déconcertée. Je me suis alors déplacée à un autre bureau… mais une heure plus tard, même scénario avec un autre collègue. »
Ce genre de situation, Émilie, assistante de direction dans une entreprise de conseil, l’a vécu à plusieurs reprises. « À force, je n’ose même plus m’installer quelque part sans redouter qu’on me demande de bouger. J’ai l’impression de déranger, où que j’aille. » Ces micro-agressions, bien que banales en apparence, ont un impact profond : perte de repères, sentiment d’exclusion, anxiété sociale croissante. « Aujourd’hui, j’appréhende les jours de présence au bureau. Je dors mal la veille, je suis sur les nerfs. C’est paradoxal, car j’aime mon métier, mais je souffre de plus en plus du travail en présentiel. »
Face à ce stress chronique, Émilie a fini par en parler à sa manager. « Elle m’a écoutée, mais n’a pas vraiment su comment réagir. On valorise beaucoup le télétravail dans notre entreprise, mais on n’a jamais vraiment réfléchi à la façon de bien vivre ensemble quand on revient sur site. »
Le manque de recul
Parfois, le stress est la conséquence directe d’une perception dramatique des conséquences possibles d’une action. La personne concernée ne parvient pas à prendre le recul nécessaire ou de la hauteur par rapport aux événements. Elle peut avoir des attentes trop élevées par rapport à elle-même ou par rapport aux autres. Ce type de stress résulte d’une perception négative du rapport entre la réalité et sa capacité à faire. La difficulté principale est souvent que cela engendre des pensées anxieuses négatives, parfois même infondées.
L’environnement de travail
L’environnement de travail et le travail lui-même peuvent également générer du stress ou l’aggraver. Ainsi, parmi les facteurs les plus répandus, comme ceux déjà cités auparavant, on retrouve :
• la pression mentale (ou charge mentale) liée à la quantité de travail, au management par la performance…
• le changement (de logiciels, de procédures, restructuration…)
• la frustration en matière de salaire, reconnaissance du travail, évolution de carrière, autonomie, ergonomie, conditions de travail…
• de mauvaises relations au travail, que ce soit entre collaborateurs ou avec le public, voire du harcèlement moral
Les stratégies pour mieux gérer le stress
En général, la première réaction face au stress, c’est le déni.
La première étape de la gestion du stress, c’est donc de prendre conscience de son état de stress. La deuxième, c’est de l’accepter. La troisième, c’est de trouver la volonté de changer les choses.
1
Prise de conscience
2
Acceptation
3
Changement
À partir de là, il existe plusieurs méthodes de gestion du stress.
Respirer
La gestion du stress passe essentiellement par la gestion de la respiration. En effet, en état de stress trop important, le pouls s’accélère. Il faut donc savoir faire baisser son propre rythme cardiaque. Cela permet de détendre le corps et l’esprit, ainsi que de prendre de la hauteur pour mieux analyser la situation. Demandant peu de place et de temps, les techniques de relaxation par la respiration peuvent se pratiquer à tout moment de la journée (métro, pause, à son poste…). Elles peuvent néanmoins nécessiter un accompagnement préalable pour se les approprier.
Il existe de très nombreux exercices de respiration, dont certains sont spécifiques et ont fait leurs preuves. Comme celui du « soupir physiologique », à expérimenter lors de la formation ORSYS Gérer son stress. Cet exercice provient d’une étude novatrice de Harvard des chercheurs renommés Hubermann et Spiegel, parue dans le magazine Cell Report en 2023.
Témoignage
Manager, Olivier a pris l’habitude de faire un exercice de cohérence cardiaque au quotidien. Il s’agit de l’exercice du 3/6/5 : 6 respirations par minute sur 5 minutes à la suite et idéalement 3 fois par jour.
« Je ne le fais pas systématiquement trois fois par jour, mais j’essaie de le faire au moins une fois, surtout avant un événement potentiellement stressant (réunion, entretien important, etc.). J’en ressens vraiment les bienfaits. Cet exercice m’aide à mieux gérer mes émotions et à garder mon calme dans les moments de crise ».
À noter que, dans ce domaine, l’usage d’applications s’est généralisé. Il en existe pour pratiquer la cohérence cardiaque et ainsi apprendre à respirer. D’autres applications guident leurs utilisateurs pour la relaxation et le sommeil.
Méditer
Méditer permet de prendre conscience de ses réactions et de ses émotions face à un contexte, de mieux les comprendre et les accepter. La méditation est une forme d’hyperconcentration dont les bienfaits sont très nombreux sur la santé et le mental. On peut être guidé pour la pratiquer, et nombre d’applications proposent des exercices de méditation.
Vous souhaitez en savoir plus ? Découvrez le programme de la formation Méditation de pleine conscience, gagner en sérénité.
La pratique de la méditation de pleine conscience ou mindfulness est un outil très efficace dans la gestion du stress et la prévention des risques de burn-out. Cette formation vous initiera à la méditation et vous permettra d’augmenter votre bien-être quotidien au travail.
Les participants en parlent :
« Une approche très accessible à la méditation est apportée effaçant de nombreux préjugés. »
« Très bonne formation, très enrichissante. On repart avec des choses concrètes à appliquer à court et long termes. »
Déconnecter du travail
Déconnecter du travail, cela peut consister à se reconnecter à des loisirs : sorties, soirées, centre d’intérêt, passion… Ces moments permettent de se changer les idées et de prendre du temps pour autre chose que le travail.
Pour les télétravailleurs, déconnecter du travail signifie aussi ranger le poste et le matériel de travail tous les soirs. Surtout lorsque le télétravail s’effectue dans une pièce qui n’est pas un bureau dédié (chambre, salon, cuisine). Le soir et le week-end, le travail doit disparaître de l’espace de vie.
S’exprimer
La charge de travail pose problème ? Il peut être utile de formuler une demande de définition de poste et d’objectifs. En fonction de la réponse, il sera possible de mieux visualiser les tâches qui relèvent du poste. Et surtout celles qui n’en font pas partie avec un allègement de la charge de travail en perspective.
Déculpabiliser
Conscience professionnelle ? Perfectionnisme ? Il faut savoir lâcher prise et déculpabiliser. Autrement dit, il s’agit d’accepter d’être faillible et que les choses ne peuvent pas toujours être parfaites.
Lire aussi
Formation
Reconnaître ses émotions, les accueillir et les exprimer de façon constructive
Comprendre ses émotions et savoir les réguler est un vrai enjeu de santé publique ! Les études scientifiques montrent aujourd’hui que la colère – par exemple – est un facteur aggravant de risque cardiovasculaire (étude publiée en mai 2024 dans le Journal de l’American Heart Association). Stress, irritabilité et colère peuvent souvent fonctionner de concert, il est donc très important d’en prendre conscience pour agir si l’on est concerné.
Formation
Maîtriser ses émotions pour être plus efficace
Découvrez et expérimentez les outils et méthodes pour mieux comprendre et maîtriser vos émotions dans des situations professionnelles exigeantes.
Les points clés
- Développer son intelligence émotionnelle
- Canaliser ses émotions
- Être en capacité de prendre des décisions réfléchies
Exemple d’exercices pratiques : simulation de situations professionnelles sur l’assertivité et le désamorçage d’attitudes agressives
Être optimiste
Apprendre à voir le bon côté des choses. Développer son sens de l’humour. Échanger avec des collègues. Ce sont autant de leviers quotidiens qui permettent d’évacuer le stress.
Se détacher des pensées anxieuses ou négatives
Aider son cerveau à faire le tri entre la réalité et les « mauvais fantasmes » est un exercice salvateur, que vous pouvez pratiquer selon des méthodes structurées et de façon posée. Ce sont des exercices concrets spécifiques que je fais faire en formation. Par exemple : se dire « Je suis en train de penser que… » permet de mettre à distance la pensée en question et de se rendre compte que ce n’est qu’une pensée… On estime d’ailleurs que 92 % des peurs ne sont que des pensées irrationnelles.
Booster son mental
Le cerveau est conçu pour confirmer ce que l’on croit déjà. Ainsi, quand vous vous croyez incapable de faire face à une nouvelle situation, vous enclenchez vous-même un cercle vicieux qui vous pousse à vous décrédibiliser de plus en plus. Bonne nouvelle : l’inverse est aussi vrai ! Quand vous percevez un changement comme un nouveau défi à relever (plutôt que comme un obstacle impossible à surmonter) ou comme l’occasion d’apprendre de nouvelles choses, vous déclenchez le principe de « pensée positive » auquel le cerveau est tout aussi réceptif. Il va alors vous conforter dans cet état d’esprit. Ce qui va renforcer la confiance en vous et l’optimisme, et permettre d’affronter les difficultés plus fort et épanoui.
Certaines méthodes ont fait leurs preuves comme l’autosuggestion et la visualisation. L’hypnose et la sophrologie – en accompagnement thérapeutique et en coaching – sont également de formidables alliées.
Exemple de méthode de visualisation
Imaginez-vous dans une situation positive et vivez-la avec tous vos sens.
Fermez les yeux et imaginez-vous en train de réussir une prise de parole professionnelle par exemple, avec un maximum de détails. Que voyez-vous ? Qu’entendez-vous ? Que ressentez-vous ? Vous pouvez vous imaginer dans la salle devant le public, vous êtes à l’aise, vous parlez avec facilité, vous voyez les gens sourire et applaudir…
Lire aussi : Faites le test ! Savez-vous gérer votre stress ?
Si vous ne pouvez pas toujours agir ou influencer votre environnement pour le vivre mieux, vous pouvez à tout moment en changer votre perception. Les ressources sont en vous. De nombreux outils et types d’accompagnement permettent de les révéler pour mieux les exploiter.En les utilisant, vous pouvez alors faire du stress un allié plutôt qu’un ennemi, car ils vont vous permettre de récupérer l’énergie véhiculée pour en faire un usage positif, vous aidant à surmonter un obstacle ou améliorer une situation, plutôt qu’à mal la vivre.

